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Syndicat Employés et Cadres du COMMERCE FO 91

2011... ça fait 140 ans que ...

1871 - Les batailles de La Commune de Parislouise-michel-portrait.jpg

Après tout un cycle insurrectionnel commencé en 1789, qui a rebondi en 1830 et 1848, on assiste à une sorte de début des révoltes ouvrières du XXe siècle. Réaction contre la défaite et contre l'oppression, les passions sont avivées au point de provoquer une véritable guerre civile.

 

Après l'échec de la révolution de juin 1848 et l'installation de l'Empire autoritaire, la condition ouvrière se détériore. En juin 1854, l'obligation du livret ouvrier est généralisée. Mais au début des années soixante, sous la pression de la bourgeoisie industrielle et commerçante, l'Empire se libéralise. Ouvriers et artisans en profitent. Entre 1851 et 1860, cent six grèves éclatent. En février 1864, les ouvriers publient le "manifeste des 60" demandant «la liberté du travail, du crédit et de la solidarité».

 

En mai, les grèves sont tolérées puis en octobre, l'Association Internationale du Travail (AIT ou Première Internationale) est fondée à Londres. Elle est moins politique que les Internationales suivantes et s'occupe essentiellement d'action sociale et coopérativiste ainsi que de l'organisation de grèves et de soutien aux grévistes. À la veille de la guerrede 1870, l'AIT compte plusde 10 000 membres actifs en France : Paris, Marseille, Lyon et Rouen. Les grèves se multiplient chez les bronziers, les ouvriers du bâtiment et les mineurs. En 1869, l'AIT diffuse le "programme de Belleville": suffrage universel intégral; liberté totale de réunion, de presse et d'association; instruction primaire obligatoire, gratuite et laïque; séparation de l'Église et de l'État; suppression de l'armée de métier. Autant de points de programme de la Commune. Le 7 février 1870, les Républicains tentent de soulever Belleville, «ce Mont Aventin de la Démocratie». Ne voulant mêler social et politique et voyant les nuages qui s'amoncellent, l'AIT fait échec à cette tentative. En effet, face aux revendications ouvrières, Napoléon III et certains de ses conseillers verraient bien une bonne guerre pour rétablir l'Empire autoritaire.

La France prend prétexte de la succession du trône d'Espagne pour déclarer la guerre à la Prusse le 19 juillet. À 265 000 hommes contre 500 000 la défaite est inévitable. En août, l'armée du général Bazaine se laisse enfermer dans Metz, elle n'en sortira qu'au printemps 1871 pour parachever l'écrasement de la commune.

Le 14 août, les Blanquistes renouvellent la tentative des Républicains à Belleville, cette fois à la Villette. Deux semaines plus tard, l'empereur capitule sans condition dans Sedan. Le 4 septembre, les manifestants envahissent les rues de Paris aux cris de «Vive la République!». Les Prussiens continuent d'avancer et à chacune de leurs victoires la Bourse de Paris grimpe. Le 19 septembre, ils mettent le siège devant Paris. Gambetta s'échappe en ballon et organise la résistance à partir de Tours. Il mobilise 600 000 hommes et reprend Orléans. Mais peu aguerries, les nouvelles armées de la République sont enfoncées. Paris, défendu par 200 000 soldats et 340 000 gardes nationaux, est isolé. Le froid et la faim exaspèrent les rancoeurs envers l'occupant, les bonapartistes et les libéraux. Le 7 octobre, les parisiens manifestent aux cris de «Vive la Commune!». Le 31, la chute du fort du Bourget entraîne une insurrection populaire. Le 22 janvier 1871, le général Vinoy, commandant de la place de Paris, réprime une nouvelle émeute: bilan trente morts. Le 28, le gouvernement signe l'armistice avec Bismarck.

Le 8 février, des élections législatives ont lieu sous la botte prussienne. Les droites, dirigées par Adolphe Thiers, l'emportent, alors que Paris élit Gambetta, Victor Hugo et Garibaldi. La nouvelle assemblée, réunie à Bordeaux, cède l'Alsace et la Lorraine, laisse les Prussiens défiler dans Paris, s'installe à Versailles, la ville des Rois. Mais Thiers va prendre encore d'autres mesures impopulaires. Il déclare la fin du moratoire sur le paiement des loyers et supprime la solde de 30 sous des gardes nationaux. Dans la foulée, le 18 mars, les Versaillais tentent de voler les canons de la garde nationale entreposés à Montmartre. La foule s'y oppose et fusille les deux généraux qui menaient ce rapt. Le Comité central de la garde nationale s'installe alors à l'Hôtel de Ville, siège du pouvoir parisien. Les élections du Conseil général de la Commune se déroulent le 26 mars. 230 000 électeurs sur 485 000 y participent. Sur 65 conseillers, 25 sont des ouvriers : Varlin, Camelinat, Franel... Il y a des Républicains comme Jules Ferry, qui abandonnera bientôt la Commune, des Radicaux comme Delescluze, mort au combat, des Blanquistes comme Ferré, des Socialistes, des Proudhoniens et des Bakouniniens de l'AIT.

La Commune se proclame gouvernement de la France et prend contact avec la province. Mais les Communards ne sont guère plus de 60 000 (80% d'ouvriers), dont 30 000 en armes, contre 130 000 Versaillais qui ont remplacé les Prussiens aux portes de Paris. Le 2 avril, les combats commencent à Courbevoie et dix jours plus tard, la Commune reprend Neuilly. Mais le 30, les Versaillais prennent le fort d'Issy puis celui de Vanves. À cause d'une trahison, ils entrent dans Paris par la porte de Saint-Cloud le 21 mai. Va alors débuter la "semaine sanglante". Paris se couvre de plus de 500 barricades. Les derniers combats ont lieu dans le cimetière du Père Lachaise puis à Belleville. La répression est à la hauteur des peurs inspirées par cette commune ouvrière. Les Versaillais ont perdu 2 000 soldats. 20 000 Communards sont massacrés, 38 000 arrêtés dont 4000 déportés aux bagnes. Quelques chanceux se réfugient en Belgique et en Angleterre. Paris vivra sous l'état de siège jusqu'en 1876. Il manque 12 000 ouvriers de la chaussure, 6 000 de l'ameublement, 5 000 du vêtement, 3 000 plombiers, 1 500 bronziers: tués, arrêtés ou en fuite.

Si la Commune était la colère de vaincus et les rêves précurseurs, aujourd'hui dans la mémoire populaire, elle reste un mouvement qui reste avec sa part d'idéal dans la conscience collective, avec ces Communards qui tiraient sur les horloges pour arrêter le temps avant que ne revienne celui des cerises chanté par Jean-Baptiste Clément.

 

1871 - Eugène Varlin, ouvrier relieur

Évocation d'une figure du mouvement ouvrier. Ce militant de la commune de Paris, dont l'assissinat par les Versaillais rappelle pour toujours la sauvagerie dont sont capables les classes dirigeantes effrayées par le souffle de l'Histoire, reste le symbole de l'engagement révolutionnaire.

Le souvenir tragique de la révolution de 1848, qui s'est terminée en juin par le massacre des ouvriers de Paris, a retardé en France l'émergence d'organisations de défense et d'entraide de la classe ouvrière. Dès la fin du XVIIIe siècle, des associations "mutuelles" ou "fraternelles" s'étaient cependant constituées, mais elles restaient circonscrites à quelques corporations. Sous la monarchie de Juillet, certaines s'étaient transformées en "sociétés de résistance" et n'avaient pas hésité, malgré la loi Le Chapelier, à déclencher des grèves. Il faudra pourtant attendre en France les années 1860 pour que l'organisation de la classe ouvrière prenne une réelle ampleur. Les ouvriers anglais, eux,avaient déjà créé des trade-unions, qui avaient rapidement pris une dimension nationale dans le cadre des grandes sociétés "amalgamées" comme celles des Mécaniciens (1851), puis des Charpentiers et des Mineurs. Cette dynamique de l'union fut plus lente en France. Le mouvement ouvrier français avait, certes, évolué depuis 1848. Imprégné de socialisme proudhonien, il avait pris progressivement, sous l'Empire, ses distances vis-à-vis de l'opposition politique, les Républicains et les Libéraux.

Toujours à partir de 1860, Napoléon III, dont le pouvoir commençait à vaciller, fut contraint d'adopter une politique plus libérale. Il ne réprima pas l'importante grève des typographes parisiens de 1861 et accepta l'année suivante l'envoi à Londres, lors de l'Exposition universelle, d'une délégation de deux cents ouvriers, désignés par des présidents de sociétés de secours mutuel.

L'ouvrier relieur Louis Eugène Varlin, qui en 1857 avait créé la société de secours mutuel de sa corporation, faisait partie du groupe. Il reviendra de Londres, comme tous les délégués, plein d'admiration pour l'efficacité des trade-unions et réclamera l'octroi des droits d'association et de coalition. Il faudra néanmoins attendre la loi du 24 mai 1864 pour que les articles 414 et 416 du Code pénal, qui faisaient de la "cessation concertée du travail" un délit, soient remplacés par des articles stipulant que les "atteintes au libre exercice de l'industrie et de la liberté du travail" et les "violences, voies de fait, menaces ou manœuvres frauduleuses tendant à forcer la hausse ou la baisse du salaire" étaient interdites. En clair, cela revenait à reconnaître, sous conditions, le droit de grève. Mais le droit d'association n'était toujours pas reconnu. 

Les premières chambres syndicales apparaissent pourtant à Paris, puis à Marseille et Bordeaux. Dans la capitale, ce sont les ouvriers ébénistes, puis les cordonniers, typographes, les orfèvres de Paris, les tailleurs de pierre de la Seine..., qui créent ainsi ces premiers "syndicats" (sans le nom) professionnels. Parallèlement, les grèves se multiplient à partir de 1854. Une des plus importantes est celle des bronziers de Paris, en 1855, pour la journée de dix heures.

En 1868, le droit de coalition est, enfin, officiellement "toléré". Dès lors, le processus d'union des chambres syndicales était amorcé selon un double mouvement. L'un conduira rapidement à la formation de fédérations nationales professionnelles: les chapeliers sont les premiers à créer en 1870 leur chambre syndicale. L'autre aboutira à l'union de chambres syndicales de différents métiers d'une même ville. Le 1er décembre 1869, Eugène Varlin, qui sera fusillé deux ans plus tard par les Versaillais, annonce la constitution de la première chambre fédérale des Sociétés ouvrières de Paris. L'idée même d'une Confédération commence à se préciser.

 

1871 - Louise Michel et l'internationalisme

Louise Michel (1833-1905), arrêtée à la fin de la Commune, déportée en Nouvelle-Calédonie, rentre en France et publie ses mémoires en 1898.

Un extrait de la préface.

«Du mur des fusillés de mai 71, j'aurais voulu saluer les morts des hécatombes nouvelles, les martyrs de Montjuich, les égorgés d'Arménie, les foules écrasées d'Espagne, les multitudes fauchées à Milan et ailleurs, la Grèce vaincue, Cuba se relevant sans cesse, le généreux peuple des États-Unis qui, pour aider à la délivrance de l'île héroïque, fait la guerre de liberté.Puisqu'il n'est plus permis d'y parler hautement, c'est ce livre que je leur dédie; de chaque feuillet soulevé comme la pierre d'une tombe s'échappe le souvenir des morts.»

Paris, le 10 juin 1898.

 

1871 - L'œuvre de La Commune

En deux mois, du 19 mars au 28 mai, la Commune a légiféré et pris nombre de mesures pour améliorer la vie du peuple de Paris. Bien qu'elle ait été accaparée par la guerre dès le 2 avril, cela n'a pas empêché la prise de décisions inédites pour le mouvement ouvrier, d'autant que pour la première fois, elles n'ont pas été imposées parl'État. C'est ce que les Communards ont mis en forme à la mi-avril 1871, en tant que programme "socialiste et fédéraliste".

L'une des premières mesures symboliques, dans l'esprit de l'an II et des soldats de Valmy, fut le changement de drapeau. 1792 remplaça le drapeau blanc par le tricolore; 1871 prit le rouge et instaura un calendrier révolutionnaire. C'est dans le domaine économique que les changements furent les plus radicaux: le paiement des dettes et des échéances fut prorogé. Alors que Monsieur Thiers lève le moratoire des loyers, la Commune, au contraire, déclare la remise des loyers jusqu'à une date indéterminée. Le mont-de-piété est réorganisé pour éviter cette usure déguisée. Autre mesure très symbolique : la suppression du travail de nuit dans les boulangeries malgré les difficultés de ravitaillement. Enfin, les amendes et les retenues sur salaire sont interdites. La même directive supprime les bureaux de placement.

La Commune, c'est aussi une tentative de gestion ouvrière. Une commission de travail est créée avec des spécialistes et avec les coopératives ouvrières pour remettre en marche, encadrer et faire produire les usines abandonnées par leurs patrons, qui en grande majorité ont fui à Versailles ou en province. Mais l'œuvre de la Commune est aussi éducative et culturelle. Vaillant et Vallès ont tenu à mettre sur pied un programme scolaire, laïque et démocratique. Ces programmes gratuits devaient toucher le primaire mais aussi le secondaire. Dans ce but, une véritable éducation populaire pour adultes est souhaitée.

Mais les hommes et les femmes passent plus de temps surles barricades que dans les conférences, même si les universités et les musées leur sont ouverts gratuitement par les intellectuels communards. Ces derniers sont à l'origine d'autres mesures symboliques : le renversement de la colonne Vendôme, représentant le culte «de la guerre et du despotisme», ainsi que l'incinération de la guillotine et l'arrachage de quatre dalles la soutenant. Les Versaillais ont rapidement remis tout cela en place.

Enfin, sous l'impulsion de Louise Michel et d'autres encore, la place de la femme dans la Commune fut fort importante. Elles participèrent à la lutte comme infirmières, brancardières, cantinières, mais aussi comme combattantes. Elles sont également présentes dans les commissions de travail etd'organisation de la Commune. Bref, cette dernière fut bien plus qu'une simple insurrection ouvrière.

 

1871 - Louise Michel: La mort d'Eugène Varlin et celle de La Commune

L'héroïne de la Commune de Paris décrit l'assassinat par les Versaillais du militant qui est resté dans l'histoire du mouvement ouvrier, comme elle-même, le symbole du soulèvement populaire.

«La Commune était morte, ensevelissant avec elle des milliers de héros inconnus. Ce dernier coup de canon à double charge énorme et lourd! Nous sentions bien que c'était la fin; mais tenaces comme on l'est dans la défaite, nous n'en convenions pas...

Ce même dimanche 28 mai, le maréchal Mac-Mahon fit afficher dans Paris désert: “Habitants de Paris, l'armée de la France est venue vous sauver! Paris est délivré, nos soldats ont enlevé en quatre heures les dernières positions occupées par les insurgés. Aujourd'hui la lutte est terminée, l'ordre, le travail, la sécurité vont renaître”.Ce dimanche-là, du côté dela rue de Lafayette, fut arrêté Varlin : on lui lia les mains et son nom ayant attiré l'attention, il se trouva bientôt entouré par la foule étrange des mauvais jours. On le mit au milieu d'un piquet de soldats pour le conduire à la butte qui était l'abattoir. La foule grossissait, non pas celle que nous connaissions: houleuse, impressionnable, généreuse, mais la foule des défaites qui vient acclamer les vainqueurs et insulter les vaincus, la foule du vae victis éternel. La Commune était à terre, cette foule, elle, aidait aux égorgements. On allait d'abord fusiller Varlin près d'un mur, au pied des buttes, mais une voix s'écria : “il faut le promener encore”; d'autres criaient: “allons rue des Rosiers”.

Les soldats et l'officier obéirent; Varlin, toujours les mains liées, gravit les buttes, sous l'insulte, les cris, les coups ; il y avait environ deux mille de ces misérables; il marchait sans faiblir, la tête haute, le fusil d'un soldat partit sans commandement et termina son supplice, les autres suivirent. Les soldats se précipitèrent pour l'achever, il était mort. Tout le Paris réactionnaire et badaud, celui qui se cache aux heures terribles, n'ayant plus rien à craindre vint voir le cadavre de Varlin. Mac Mahon, secouant sans cesse les huit cents et quelques cadavres qu'avait fait la Commune, légalisait aux yeux des aveugles la terreur et la mort. Vinoy, Ladmirault, Douay, Clinchamps, dirigeaient l'abattoir écartelant Paris, dit Lissagaray, à quatre commandements.

Combien eût été plus beau le bûcher qui, vivants, nous eût ensevelis, que cet immense charnier! Combien de cendres semées aux quatre vents pour la liberté eussent moins terrifié les populations, que ces boucheries humaines! Il fallait aux vieillards de Versailles ce bain de sang pour réchauffer leurs vieux corps tremblants.»

 

1871- Les étrangers dans La Commune

Si la lutte contre l'envahisseur prussien fut le point de départ et une composante essentielle du mouvement des insurgés, tout montre qu'ils étaient aussi éloignés que possible de tout esprit chauvin.

La Commune voulut se donner comme chef militaire un étranger, Giuseppe Garibaldi, qui avait combattu les Allemands en Bourgogne avec ses "Chemises rouges" au nom de la défense de la jeune République française.

Élu député à l'Assemblée nationale par Paris et par quatre départements, Garibaldi refusa finalement le commandement en chef de la Garde nationale. «Considérant que le drapeau de la Commune est celui de la République universelle; Considérant que toute cité a le droit de donner le titre de citoyens aux étrangers qui la servent; Considérant que le titre de membre de la Commune est une marque de confiance plus grande encore que le titre de citoyen», les fédérés accueillirent nombre d'étrangers pour la plupart membres de l'Internationale.

Léo Fränkel, représentant de la section allemande de l'Internationale, fut candidat socialiste révolutionnaire à l'Assemblée puis membre de la Commission exécutive de la Commune. Dombrowski et Wroblewski, considérés comme les meilleurs généraux de la Commune, étaient polonais. Il y eut 1 725 étrangers arrêtés durant la répression. En l'absence de documents précis, on ne connaît pas les nationalités de tous ceux qui ont participé aux combats. On a dénombré 737 Belges, viennent ensuite les Polonais (entre 500 et 600). Durant la semaine sanglante, le seul fait d'avoir un nom de consonance étrangère suffisait généralement pour passer devant le peloton d'exécution. Le Figaro réclamait alors l'extermination de «tous les Polonais interlopes, tous les Valaques de fantaisie, qui ont régné deux mois sur la plus belle et la plus noble ville du monde».

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