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Syndicat Employés et Cadres du COMMERCE FO 91

« au 15 du mois, nos porte-monnaie sont vides »

http://www.humanite.fr/2008-02-27_Politique_-Les-gens-n-ont-plus-peur
Article paru
le 27 février 2008


« Les gens n’ont plus peur ! »
Délégués CGT et FO chez Bricorama, Marie-Claire et Kamel racontent le mouvement social sans précédent, pour les salaires, qui secoue la chaîne de magasins de bricolage.

« On ne lâchera pas. » Surtout, ne pas se faire d’illusion : s’ils s’expriment calmement et se dépensent pour « éviter les débordements » de leurs collègues, Marie-Claire Sanson et Kamel Remache sont très déterminés. L’une est vendeuse au rayon décoration, l’autre exerce au rayon sanitaire et plomberie. Fraîchement nommés, fin 2007, délégué syndical central par leur syndicat - la CGT pour elle, FO pour lui -, tous deux font, depuis quelques semaines, l’apprentissage de la lutte dans une grande enseigne de la distribution, Bricorama et Batkor (près de 80 magasins en France). Marie-Claire et Kamel sont acteurs d’un événement sans précédent : les premières grèves de l’histoire de cette enseigne. Ensemble, ils font, ces temps-ci, la tournée des établissements, répondant à l’appel des salariés qui veulent en découdre et leur demandent de l’aide. Samedi dernier, c’était le tour de celui du centre commercial Galaxy de Paris-13e, où la moitié des 23 employés avaient cessé le travail. Un mouvement qui a fait un tabac parmi la clientèle, rapporte Kamel, exhibant des liasses de pétitions couvertes de signatures de solidarité. Quelques jours plus tôt, la grève avait touché les magasins d’Albi (« 100 % de grévistes ») et de Troyes. D’autres débrayages sont en préparation. « Les gens veulent faire grève, ils nous appellent. On les laisse décider. On regarde juste s’ils sont plus de 50 % à vouloir cesser le travail, faut pas faire n’importe quoi », dit le délégué FO.

Ce sont les négociations annuelles obligatoires sur les salaires (NAO) qui ont mis le feu aux poudres. Chez Bricorama (4 200 salariés), groupe dont le PDG et propriétaire, Jean-Claude Bourrelier, est classé 179e fortune de France, avec un portefeuille de 226 millons d’euros, les rémunérations dépassent difficilement le niveau du SMIC, témoignent Marie-Claire. Elle perçoit 850 euros pour 27 heures hebdomadaires, après vingt ans de maison ; Kamel, « entre 1 000 et 1 100 » euros pour 35 heures. « Les salariés nous disent : « au 15 du mois, nos porte-monnaie sont vides ». Problème le plus brûlant, à entendre Marie-Claire : le logement. « Je suis présidente du « 1 % logement ». Je vois des salariés en précarité. Avec un salaire de 1 000 euros, impossible de payer un loyer ». « Dans mon magasin, enchaîne Kamel, on a eu le cas d’un employé SDF. On cotisait tous ensemble pour lui venir en aide, pour qu’il paye l’hôtel, certains l’hébergeaient ». Là comme dans l’ensemble de la distribution, la faiblesse des salaires tient pour une bonne part au temps partiel. « Les caissières ont des contrats de 23, 25 heures. Certaines, de 7 heures 30 de travail le dimanche seulement… »

La colère a explosé lorsque la direction a mis sur la table ses « propositions » : 5 euros pour le minimum, porté à 1 310 euros bruts, 1,5 % d’augmentation générale attribuée à chacun « à la date anniversaire d’embauche » (pas de chance pour ceux qui sont entrés en décembre…), 1,5 % pour les seuls salariés « avec 23 mois d’ancienneté » (ce qui, « vu » le grand turn-over qu’il y a chez nous », écarte le plus grand nombre), et 30 centimes pour le ticket restaurant, ainsi porté à 7 euros. « Inacceptable, scandaleux ». « On veut 5 % immédiatement et sans condition », clament Marie-Claire et Kamel. Et d’avertir : « Maintenant, les gens parlent, ils n’ont plus peur. » L’appel national, sans précédent, à la grève lancé le 1er février dernier par tous les syndicats de la distribution a donné confiance. À la télé, « on parlait des caissières dans l’alimentation. Je me suis dit : dans le bricolage, on est pareil, temps partiel imposé, sous-effectif », dit Marie-Claude. « Le 1er février, ça nous a ouvert le chemin, confirme Kamel. On ne s’arrêtera pas là ». À bon entendeur…

Yves Housson

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